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J+356 — Aoraki Mt Cook : des montagnes, des glaciers et de la neige…

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La journée s’annonce bien : soleil et grand ciel bleu nous accueillent et alors que nous longeons le lac Pukaki en direction du parc national d’Aoraki Mt Cook nous pouvons admirer les cîmes enneigées des alpes qui se découpent sur l’horizon. C’est annoncé : rien ne pourra nous contrarier aujourd’hui, pas même les moutons qui bloquent la route et retardent notre arrivée.

Au Visitor Centre on apprend que notre projet de monter les 1.000 mètres d’altitude jusqu’à Mueller Hut va s’avérer compliqué, à moins d’avoir crampons et piolets et de traverser des couloirs d’avalanche. La faute aux chutes de neige des derniers jours, inhabituelles en ce mois d’octobre. Il y a même de la neige dans le petit village où se situe le Visitor Centre et quelques hôtels. Comme on est équipés comme des touristes plutôt que comme des alpinistes on va se rabattre sur notre plan de repli, car désormais on a toujours un plan de repli pour ne pas avoir fait des kilomètres pour rien.

Le plan est simple et infaillible : une petite balade toute simple, quasiment plate, dans Hooker Valley, jusqu’au pied du glacier du même nom. Simple et sans accroc. Enfin sans compter la neige encore fraîche, épaisse de 5 à 10 centimètres, qui recouvre le chemin et commence à fondre avec le soleil. Ainsi nous alternons entre glissades et pieds mouillés dans la neige fondue. D’autant plus que vu la fréquentation importante du chemin la neige a vite fait de se transformer en boue. Pas grave, on a connu pire !

Le chemin est parsemé de grands ponts suspendus qui permettent de passer bien au dessus de la Hooker River qui est alimentée par la fonte des neiges et des glaciers et qui semble grossir à vue d’œil. Malgré les pieds trempés et froids on ne peut s’empêcher d’avancer en direction d’Aoraki Mt Cook, le plus haut sommet du pays, à 3.724 mètres d’altitude. Il faut dire que la vue est si belle, avec plus de nuances de bleu qu’il ne serait possible de les nommer, que rien ne pourrait nous arrêter dans notre balade. Rien, pas même le bruit de tonnerre des avalanches qui se déclenchent dans les montagnes alentour avec le réchauffement de la neige.

Nous croisons un abri de fortune, à l’intérieur duquel il fait incroyablement froid comparé à la douceur extérieure, mais on peut dire que séjourner dans Stockings Shelter ne doit pas être désagréable quand même étant donné la vue qu’offre sa seule et unique fenêtre.

Enfin nous arrivons sur les berges du lac Hooker, là où il y a quelques années seulement se dressait encore un large et majestueux glacier. Aujourd’hui avec le réchauffement climatique la face terminale du glacier a reculé de quelques kilomètres et fait place à un lac peuplé d’icebergs qui craquent et s’entrechoquent. Parfois on peut voir et entendre un énorme bloc de glace se détacher de la face terminale du glacier et provoquer des remous dans l’eau. Puis après les remous un craquement s’étend à tout le lac. Sinistre, inquiétant et mystérieux, comme si le lac tout entier était vivant et commençait à se réveiller.

Assis sur les rochers de la moraine nous profitons du soleil pour réchauffer nos pieds et chaussures avant de repartir vers le village et profiter d’une nouvelle séance de piscine gratuite pour nos petons. Plus bas le glacier Mueller est visible, mais semble avoir disparu complètement. À la place d’immenses murs de cailloux noirs marquent les moraines du glacier aujourd’hui devenu lac. Alors qu’il y a quelques dizaines d’années le sentier passait directement sur le glacier, aujourd’hui il faudrait parcourir des kilomètres pour le voir de près.

Au parking nous faisons sécher chaussures et chaussettes au soleil avant de rejoindre le parking de la Tasman Valley, quelques kilomètres plus loin. On part faire une balade vers les Blue Lakes, mais ceux-ci sont verts aujourd’hui en réalité et au bout de quelques centaines de mètres on se rend compte que le niveau du lac est tellement haut que notre sentier est en réalité sous un mètre d’eau. Forcément à un moment longer la berge n’est plus possible et une forêt d’épines nous barre le chemin et nous oblige à faire demi-tour, vu que nous n’avons que peu de désir à piquer une tête dans ces lacs de montagne.

Pas grave on prend donc le chemin de Tasman Glacier Lake, qui doit nous emmener voir le glacier de Tasman, le plus long du pays avec ses 27 kilomètres. C’est un véritable monstre : 600 mètres d’épaisseur sur 4 kilomètres de large. Hélas encore une fois le réchauffement climatique travaille fort et la face terminale du glacier est maintenant à des kilomètres de nous, laissant un large lac entre le glacier et nous. Ce lac est apparu il y a 30 ans et fait désormais plus de 10 kilomètres de long, et ce n’est pas terminé, le glacier perdant presque 1 kilomètre par an. À ce rythme-là dans un peu moins de 40 ans le glacier aura disparu.

Il est difficile de se rendre compte de l’immensité vertigineuse du paysage. Tout est gigantesque et lunaire. Les icebergs échoués sur le lac donnent une idée de la taille proprement incroyable du lieu. Un bateau touristique passe sur le lac, et à côté des icebergs il est minuscule. Les blocs de glace sont hauts comme des immeubles de 5 ou 6 étages. Je prends une photo de l’hélicoptère qui survole la face terminale, de loin on aurait dit un moucheron, mais en réalité il est si petit qu’il est impossible de le distinguer en photo.

Plus loin les moraines désertiques forment de petits plans d’eau aux couleurs surréalistes, et nous ne résisterons que quelques secondes à l’appel à descendre du point de vue à travers les rochers pour rejoindre le bord de quelques-uns de ces petits étangs turquoises.

Après pas mal de crapahutage dans les rochers on y parvient, on fait quelques photos, on se rend compte qu’en un kilomètre de marche nous ne nous sommes quasiment pas rapprochés du glacier, et nous repartons vers la fin du lac où les plus petits icebergs viennent s’échouer avant de se briser en blocs de glace et descendre la rivière en roulant comme des billes.

Le soleil commence à disparaître derrière les montagnes, la température commence à descendre en dessous de zéro, on décide donc de rentrer passer une nuit au camping à côté du village du parc national, un peu cher, mais c’est le seul ici. La nuit sera froide, m’empêchant de dormir confortablement, me réveillant régulièrement, recroquevillé en chien de fusil, et ce malgré le sac de couchage et la couette. Malgré tout je ne peux m’empêcher de retourner dans ma tête les images de la journée, comme si j’étais l’acteur, le réalisateur et le principal protagoniste d’un documentaire sur les plus beaux paysages au monde.