J+349 — Le temps s'égrène inlassablement sur les rives du lac-diamant
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Les jours passent, les uns après les autres, avec plus ou moins de surprises et de monotonie. Nous sommes lundi, une semaine de plus vient de s’écouler. Dans deux semaines nous reprendrons l’avion pour la France, terminant notre périple d’un an. Mais on n’y pense pas vraiment, en tout cas pas encore. Pour l’instant nous essayons de profiter des magnifiques paysages de la Nouvelle-Zélande entre deux averses, entre deux nuages, entre deux journées de grisaille.
Aujourd’hui la journée commence bien : il ne pleut pas. Non pas qu’il fasse soleil, ça serait trop en demander, mais simplement il ne pleut pas, et les nuages sont encore hauts. Parfois un rayon de soleil arrive même à percer l’indicible plafond gris qui nous surplombe. Voilà un temps qui nous pousse à partir avec entrain sur le sentier de notre première balade de la journée : l’ascension du petit sommet de Rocky Mountain, au dessus de Lake Diamond.
On grimpe un peu avant de rejoindre la rive du lac, où l’on croise des toilettes installées là par le DOC. Le souci de préservation de l’environnement est à ce point : ici on met des toilettes le long des sentiers pour éviter de transformer le lieu en décharge à ciel ouvert. On continue ensuite à monter via des escaliers aménagés en bois, et on arrive à un point de vue où un couple allemand profite de la vue sur le lac Matukituki entouré des montagnes de Wanaka. Ils auraient tort de se priver.
On quitte les arbres pour rejoindre des prairies sub-alpines et inaugurer nos premiers pieds mouillés de la journée. L’herbe qui semble sèche et jaunie, est en réalité une éponge spongieuse qui engloutit nos pieds. Mais ça va une fois qu’on s’est fait avoir une fois on est prudents, alors nos pieds ne sont que légèrement humides. On parvient au sommet. La vue est magnifique, évidemment.
Pour faire une boucle nous choisissons de redescendre par le sentier du versant ouest, plutôt que celui de l’est d’où nous venons. Sauf que le versant ouest doit recevoir beaucoup moins de soleil, visiblement. Nous devons crapahuter dans des rochers et ruisseaux quasiment à la verticale avant de descendre en lacets dans la boue. Ça glisse mais on passe sans trop se casser la gueule. On retrouve le bord du lac puis le parking et le van et nous reprenons la route.
Notre seconde destination aujourd’hui c’est Rob Roy Glacier, 40 kilomètres plus loin sur la route gravillonnée. La route était notée comme un peu chaotique avec quelques passages de ruisseaux tranquilles, bon on s’est dit ça doit passer, on va bien voir. Sauf que 10 kilomètres plus loin les rayons de soleil ont disparu. 10 kilomètres de plus et le temps doux mais nuageux a fait place à une pluie torrentielle qui tombe à l’horizontale. Comment est-ce possible ? Facile : le vent est déchaîné. On arrive donc à la première traversée de ruisseau sous une tempête de pluie. Le ruisseau est évidemment déjà un torrent, et même sans ça, la « route » est en réalité composée d’un lit de gros galets. Si le ruisseau avait été à sec on ne serait sûrement pas passés sans taper le bas de caisse de la voiture du location, mais là, c’est carrément impossible. Je descends quand même pour aller voir de près : on vient de faire 30 kilomètres déjà quand même. En 30 secondes je suis trempé jusqu’aux os et je constate que les gros galets de la route sont glissants : c’est impraticable sans 4x4, et encore, on courrait le risque de voir le torrent devenir trop profond et trop puissant et rester bloqués plusieurs jours de l’autre côté.
On a cessé de compter les renoncements forcés de ce genre, on a l’impression qu’il y en a tous les jours. C’est déprimant. On repart sur la route et 10 kilomètres plus loin le beau temps est de retour, comme si la météo avait décidé de nous empêcher de passer là-bas, mais pas de problème pour faire de la route sous le soleil, vous pourrez juste pas faire les randos prévues. Rage. Désespoir. Et tout le reste.
Alors de la route on en fait. On revient à Wanaka, on s’arrête faire quelques courses et on repart sur le bitume. On traverse un col alpin à plus de 1.000 mètres, ça grimpe fort, on voit même un peu de neige. On s’arrête à Arrowtown, où une autre balade était prévue, Sawpit Gully. Mais le temps et les frustrations de ces derniers jours nous tapent sur le moral. On s’engueule, on ne peut plus se voir en peinture. Pour se changer les idées on décide de faire la boucle chacun de notre côté, dans le sens inverse de l’autre.
Il pleut. Il fait gris. Je suis un peu déprimé et énervé, mais je ne sais même plus pourquoi. Je pense que vivre 24h/24 et 7 jours sur 7 l’un sur le dos de l’autre mène irrémédiablement à des situations comme celle-ci.
Le sentier grimpe le long d’une gorge au fond de laquelle des 4x4 traversent sans cesse la rivière de berge en berge pour remonter la gorge jusqu’à un camping plus loin : c’est l’attraction tout-terrain du coin. Heureusement il est déjà un peu tard et le flot de 4x4 cesse bientôt. Heureusement car sans ça la gorge est assez chouette, malgré la grisaille.
Puis suivent des lacets dans la montagne et enfin d’interminables enjambements du ruisseau qui déborde. Encore une fois je ne garde pas les pieds secs bien longtemps. Je m’enfonce dans l’eau jusqu’à mi-mollet à certains endroits. Finalement je croise Anne et débarque sur un large plateau à la végétation jaunie et saturée d’humidité. Il ne reste plus qu’à redescendre par l’autre versant dans la boue glissante sous les sapins.
Il ne reste plus qu’à se retrouver au van, se changer pour des vêtements secs et reprendre la route pour trouver un camping pour la nuit.