J+346 & J+347 — Des glaciers et des pieds mouillés : Franz Josef, Fox Glacier et Haast—Paringa Cattle Track
Publié le
(Par Anne)
La nuit a été plus que venteuse (je suis bien contente de ne pas dormir sous tente, parfois !) et la pluie s’en est mêlé vers minuit. Le matin, il pleut tellement qu’on dirait qu’il fait nuit et ça n’arrêtera pas de tomber avant 15h30. On avait prévu d’aller voir les glaciers Franz Josef et Fox mais on attendra que la tempête se calme un peu avant de sortir un pied du van et d’aller voir à quoi ressemble Franz Josef, appelé ainsi en hommage à l’empereur d’Autriche par un explorateur allemand. Il se trouve à cinq kilomètres du village Franz Josef (oui oui, le patelin a le même nom que le glacier tout proche, original) où vous trouverez tout le nécessaire pour touristes (hôtels, magasins de location de matériel de randonnée, tours organisés, supérettes avec des prix exorbitants …). Le glacier Fox se trouve une vingtaine de kilomètres plus au sud sur la highway 6 et possède lui aussi son petit village touristique, Fox Village (toujours dans l’originalité) bien que moins important que son homologue à la consonance autrichienne.
Il n’est pas possible de marcher sur les glaciers à moins d’être accompagné par un guide touristique. Comptez environ 300 NZD pour avancer à la queue-leu-leu par quinze avec au moins une dizaine d’autres groupes aux alentours, pour seulement environ 30 minutes sur la glace. C’est sûrement intéressant mais est-ce que ça vaut vraiment le coup de débourser une telle somme alors que les admirer gratuitement est déjà une belle expérience ? Bon, au niveau de l’expérience, pour la première journée dans la région des glaciers, on est mal tombé. Les conditions climatiques ayant rendu les cours d’eau assez gros, on ne peut pas s’approcher à moins de 1,5 kilomètre de Franz Josef et à moins de 600 m de Fox. On est donc un peu déçu, on est trop loin pour vraiment se rendre compte de l’immensité et de la beauté des lieux. Pour les deux glaciers, les chemins d’accès sont courts et très faciles, ils sont accessibles à n’importe qui sauf en fauteuil roulant et celui pour Fox est plus sympa, plus naturel que celui pour Franz Josef. Bien qu’on ait pu aller plus près de Fox que de Franz Josef, ce dernier est plus visible, Fox étant plus caché par la montagne. Des immenses falaises noires qui bordent la vallée de Fox Glacier dégringolent des cascades, c’est impressionnant. On pourrait passer des heures à regarder les énormes morceaux de glaces se détacher et dévaler la rivière.
La fonte des glaciers est assez impressionnante, le long de la route pour Fox Glacier, des panneaux indiquent l’emplacement du glacier en fonction des années. Il fait à l’heure actuelle 13 km de long et si on note une avancée globale de la glace ces dernières années, elle ne compense pas la perte des années précédentes. Les deux glaciers ont perdu environ 2,5 kilomètres en un siècle. On estime que Franz Josef aura perdu 5 kilomètres de longueur et 38 % de sa masse en 2100. Mais non, le réchauffement climatique, ça n’existe pas, voyons !
On avait lu dans les brochures touristiques que le Lake Matheson, situé à quelques encablures de Fox Village, permettait d’admirer de magnifiques réflexions de Mount Cook (le plus haut sommet de Nouvelle-Zélande). Comme le temps est plus clément (comprendre, il vente, il fait froid mais il ne pleut plus) et que c’est sur la route de notre camping, on y fait un saut. Toutefois, les nuages bas font qu’il ne s’agit aujourd’hui que d’un lac banal avec plein de touristes. On reste donc encore une fois sur notre faim.
Pour continuer dans les déconvenues (certes minimes et sans grande importance), on reçoit vers 17h un appel de l’office du tourisme de Franz Josef nous apprenant que le Copland Track, le chemin de randonnée que l’on voulait faire le lendemain, est fermé pour dix jours à cause des fortes pluies d’aujourd’hui. Dommage, on aurait enfin pu faire notre première balade sur deux jours, avec une nuit en hutte et en prime une source d’eau chaude pour récompenser nos efforts !
On termine quand même la journée sur une note plus positive et surtout ensoleillée (il était temps !) à Gillespie Beach, située à une vingtaine de kilomètres de Fox Village, avec un un des plus beaux couchers de soleil de notre voyage. Les teintes rosées qui éclairent les dernières lueurs du jour sur Mount Cook, avec les galets parfaitement lisses de la plage en premier plan nous font rêver jusqu’à ce que tout devienne noir.
Le lendemain, le beau temps de la veille au soir se prolonge et on bénéficiera de cette clémence toute la journée. On commence la journée par un petit déjeuner à Fox Glacier où on en profite pour appeler nos parents qui dînent ensemble (les joies du décalage horaire !). On profite du beau temps pour retourner au glacier Fox où on a cette fois la chance de pouvoir s’en approcher à 200 mètres.
Sur le chemin, on croise un ranger construisant des petits ponts avec les rochers pour que les touristes ne se mouillent pas les pieds. On voit que c’est un coin plus que touristique, dans le reste de l’île, on se fiche bien de savoir si les randonneurs se trempent les orteils ! En tout cas, il a dû beaucoup pleuvoir si le chemin a été emporté. Le glacier a bien meilleure allure qu’hier, ses parois sont d’un bleu étincelant et les pics de glace s’élèvent vers le ciel avec majesté. Le seul bémol est le nombre de marcheurs sur le glacier, ça le rend beaucoup moins sauvage.
Ensuite, comme nous n’avons pas pu nous élancer sur le Copland Track et que bon sang de bonsoir, on veut faire une balade sur deux jours avec nuit en hutte avant de repartir, on se replie sur une portion du Haas to Paringa Cattle Track. Le chemin se fait normalement sur trois jours (aller). Il est possible de partir depuis la highway 6 vers Lake Moeraki ou depuis son autre extrémité sur la Haast Highway (l’autoroute qui longe la côte ouest). Notre livre-guide de randonnée proposait une balade de 22 kilomètres aller et retour jusqu’à Maori Saddle Hut depuis le départ sur la highway 6, faisable en une journée. Nous avions décidé de dormir à Maori Saddle Hut et donc de faire une dizaine de kilomètres dans l’après-midi. Nous partons donc d’un pas décidé après avoir empaqueté toutes nos affaires pour le dîner, la nuit et le petit-déjeuner et bien caché nos affaires dans le van parce qu’on laisse ce dernier sur un petit parking désert au bord de l’autoroute. Certes, les voleurs doivent bien savoir que les touristes laissent toutes leurs affaires personnelles (et coûteuses) dans leur véhicule mais ça nous rassure quand même !
On est plutôt contents d’entamer cette balade qui ne promet pas d’être magnifique mais qui semble toutefois intéressante, d’autant plus que l’on bénéficie d’un magnifique soleil. Cependant, on déchante assez rapidement, d’accord, il fait beau et chaud mais dans la forêt où se passe le début de la balade, rien n’a eu le temps de sécher en seulement une demi-journée. Le guide de randonnée précisait que la première partie pouvait être boueuse et humide et ce n’est rien de le dire ! En deux minutes, on a les pieds trempés, on glisse dans la boue et il faut parfois contourner le sentier devenu un petit ruisseau. La progression est plus que lente : malgré le fait que j’ai les chaussures détrempées, je ne peux m’empêcher d’essayer de trouver un chemin plus sec. Ce qui est stupide, il faut le reconnaître ; puisque j’ai les pieds mouillés, qu’est-ce que ça change de les replonger dans l’eau ? Le chemin ne nous aide pas non plus : il faut parfois éviter des arbres tombés en travers, passer sur des rochers lisses et glissants, se faufiler entre deux troncs …
Bref, je suis de mauvaise humeur assez rapidement et je commence à en avoir marre peu de temps après le départ, la patience n’étant pas ma première qualité. Mon ras-le-bol (et celui de Sylvain) et la crainte de ne pas être arrivés à Maori Saddle Hut avant la nuit nous poussent à nous arrêter à Blowfly Hut (appelé également Blue River Hut), située à seulement trois kilomètres de notre point de départ ! On aura mis tout de même 1h30 à les parcourir, soit environ le double de ce que l’on met habituellement. Les derniers mètres avant la hutte nous offrent un dernier cadeau typiquement néo-zélandais : un passage dans un trou d’eau. Il y a bien quelques cailloux censés nous épargner les désagréments aquatiques, mais ils sont sous l’eau ! Bref, on se déchausse et on arrive pieds nus à la hutte qui est très mignonne avec sa cheminée, sa petite terrasse et son poêle à bois. La rivière n’est pas très loin et il doit être agréable de s’y baigner en été (enfin, si toutefois un été chaud et sec existe dans ce coin du monde !). On part à la recherche de bois pour le feu après avoir suspendu nos chaussures et chaussettes. Sylvain ne trouve rien de plus malin que de fendre du bois pieds nus. C’est vrai, ça doit être tellement simple de chercher du secours au milieu de la forêt sans réseau téléphonique ! Il ne se fend pas d’orteils mais il faut bien le dire : il ne fend pas beaucoup de bois non plus ! De mon côté, je n’essaie même pas : la masse émoussée ne laisse présager rien de bien utile, je préfère ramasser du bois plus fin mais qui rentre dans le poêle. Tant pis, ça fera bien l’affaire pour cette nuit et on en laissera également pour les prochains visiteurs.
Comme on est arrivé vers 15h30, ça nous laisse plein de temps pour … et bien, pour ne pas faire grand-chose. Ne voulant pas être trop chargée, je n’ai pas emporté l’énorme Stephen King que je suis en train de lire ni mon carnet de bord. Bref, après avoir lu les deux journaux locaux qui traînent et avoir fait le tour des kermesses et mariages d’il y a deux ans, je m’ennuie un peu. On mange donc assez tôt (moi, l’ennui, ça me donne faim. L’activité aussi. En fait, j’ai tout le temps faim) et on passe quelque temps à admirer le feu en se réchauffant les pieds à la lumière d’une bougie. La nuit n’est pas très froide, je dors plutôt bien sur mon matelas, Sylvain est réveillé avant moi (c’est assez rare pour être souligné) et on ré-enfile nos chaussures humides qui redeviennent trempées en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire pour retourner au van.