Haere.net

L'aventure continue !

Retrouvez les topoguides, les livres et les récits de voyage sur haere.net

Oz. Un an en australie (et plus si affinités)

J+231 — Vagues à Kalbarri & sécession à Hutt River

Publié le

Kalbarri est un des plus célèbres parcs nationaux du Western Australia, de ce fait on ne pouvait pas faire l’impasse dessus. Donc c’est lui qui a fait l’impasse sur nous… En effet la partie la plus réputée du parc, composée du circuit de rando « The Loop » et d’un endroit dénommé « Z-Bend », est inaccessible pour cause de travaux sur l’unique route qui y mène. Et cela pour plusieurs mois, sauf quelques week-ends en juillet, mais en juillet on sera déjà loin… Bon on se dit que c’est pas si mal que cette dirt road soit bitumée, même si on se demande comment une route peut être fermée pour travaux, mais rester ouverte aux bus des tour-opérateurs. Comme quoi quand c’est fermé le commerce continue… Enfin je dois être mauvaise langue.

Nous nous rendons quand même dans la seule partie du parc ouverte dans les terres. Il s’agit de deux petits lookouts : Hawks Head et Ross Graham. Les quelques centaines de mètres à parcourir à chacun de ces endroits nous laisseront sur notre faim. Il y a déjà si peu de balades dans le nord du Western Australia, mais si en plus l’une des trois seules qui est mentionnée par notre guide de randonnée est fermée… Enfin au moins on a une jolie vue sur la vallée et la Murchison River, qui prend sa source à 800 kilomètres de là vers Meekatharra, en plein milieu du centre désertique de l’état. Cela dit on pense quand même que faire payer 11$ l’accès à ces deux petits lookouts est un petit peu délirant, heureusement qu’on a un pass des parcs nationaux du WA.

On ne reste pas longtemps, un peu agacés par ces touristes français qui passent leur temps à se prendre photo en auto-portrait avec leurs GoPro. Sûrement mon côté vieux con, mais je trouve ça ridicule. Le paysage est suffisamment joli pour ne pas foutre ta tronche mal cadrée au milieu. Enfin bon.

On quitte donc les vues sur les gorges pour rejoindre la partie un peu plus méconnue de Kalbarri : la côte avec ses falaises et gorges. On passe rapidement à Kalbarri, petite ville balnéaire sans grand intérêt, pour rejoindre Red Bluff Lookout, où un vent à décorner les bœufs chameaux ne nous empêche pas d’admirer la vue. Mais on ne va pas s’arrêter là et on continue un peu plus loin jusqu’à Mushroom Rock, petite boucle de 1,5 kilomètres. Bien que le départ de la balade ne soit qu’à quelques centaines de mètres de Red Bluff on est obligés de reprendre la voiture pour s’y rendre car il n’y a aucun chemin qui y mène, ou alors il faudrait faire le détour par la route. Pas très bien pensé…

Cette petite balade nous emmène au bord de l’océan où des rouleaux monstres s’écrasent contre les rochers. Outre les jolis rochers à la texture visuellement semblable à du cake au chocolat (mais qui ne se mangent pas, dommage), on y verra quelques crabes craintifs se sauver en courant.

Le reste de la journée consiste à aller voir les points de vue le long de la côte : Eagle Gorge, Shellhouse, Grandstand, Island Rock et enfin Natural Bridge. Autant de formations rocheuses particulières et de vues à couper le souffle. Surtout avec le soleil qui se couche derrière une couche nuageuse, c’est simplement superbe.

À Natural Bridge nous restons sur le parking pour la nuit. Le lendemain un ranger vient nous voir alors que nous sommes en train de prendre le petit-déjeuner sur le parking et nous demande de ne pas dire si nous avons dormi là cette nuit si son chef passe demander. Sympa mais on ne comptait pas le lui dire de toutes manières, principe de précaution oblige.

Ce matin nous partons revoir les points de vue d’hier mais à pied, en empruntant le Bigurda Trail, randonnée de 8 kilomètres entre Natural Bridge et Eagle Gorge. On n’en fera que la moitié, 7 kilomètres aller-retour jusqu’à Grandstand. Malgré un départ en pull, coupe-vent et bonnet pour affronter le vent et le froid nous terminons la balade en t-shirt sous un beau soleil. On est contents de faire enfin un peu de marche et de plus le paysage est loin d’être désagréable, avec ce sentier qui suit les falaises au plus près et donne ainsi de multiples occasions d’admirer les falaises et l’océan qui se fracasse à leur base, dégageant une brume épaisse dans les criques les plus agitées.

Après cette petite balade on repart sur la route pour rejoindre sur d’excellentes dirt roads la seule nation indépendante d’Australie : la principauté de Hutt River. Le propriétaire de cette ferme, le prince Leonard Ier a déclaré sécession avec l’Australie dans les années soixante-dix après que le gouvernement du Western Australia ait réduit les quotas agricoles. La ferme de Leonard aurait ainsi dû détruire 96% de sa production et déclarer faillite. Leonard a donc tenté tous les recours légaux, mais le gouvernement a refusé d’entendre raison et a même commencé à faire appliquer illégalement le quota avant que la loi ne soit même votée. Leonard a donc déclaré faire sécession de l’Australie. Suite à une partie de ping-pong entre le gouvernement du Western Australia et celui du Commonwealth, le gouvernement fédéral n’a pas donné de réponse à la sécession, acceptant de fait l’indépendance de la province de Hutt River.

Depuis la principauté a sa propre constitution, sa monnaie et ses timbres, recherchés par les collectionneurs, ses passeports, ses plaques d’immatriculation, ses ambassadeurs à l’étranger, et même une armée à l’étranger. Évidemment malgré cela l’Australie ne reconnaît pas la principauté officiellement, même si ses résidents ne sont pas soumis aux impôts australiens et que les membres du gouvernement fédéral et régional s’adressent dans leurs courriers à « Sa Majesté le prince Leonard Ier ». Cette micronation est l’une des plus anciennes au monde et est considérée comme l’une des rares à avoir un statut juridique solide, malgré le fait qu’elle ne soit pas reconnue par l’Australie ou l’UE.

Je trouve le sujet des micronations passionnant, j’ai déjà visité la Ladonia en visite à Kullaberg vers Malmö en Suède, créée en réaction à la volonté de la municipalité de détruire une immense sculpture en bord de mer (Nimis) et la célèbre ville libre de Christiania à Copenhague, mais Hutt River est la seule à avoir une histoire juridique aussi riche.

Nous nous sommes donc rendus à Hutt River, dont l’entrée est libre, pour faire tamponner nos passeports pour quelques dollars et visiter le « musée » un peu bordélique de la principauté. Musée qui expose des documents sur l’histoire de la micronation, des passeports, des coupures de presse, mais aussi un joyeux bric-à-brac : collection de pièces et billets du monde entier, de pierres précieuses ou rares, de jouets et de décos kitschs et étranges. Plus loin on peut visiter la chapelle où sont exposée des peintures religieuses et un portrait du prince. Enfin juste à côté une statue du buste du prince précède un panneau expliquant l’histoire du lieu et certains délires du prince, comme sa propre version de la suite de Fibonacci. Aucune visite ne saurait être complète sans la boutique de souvenirs et ses gadgets mais aussi son exposition de tout et n’importe quoi : livres du Reader’s Digest, épaulettes de la police allemande, etc.

Pour terminer la principauté accueille aussi le camping probablement le moins cher de tout le Western Australia. Pour 5$ la nuit par personne vous aurez un emplacement avec toilettes et douches chaudes, moins cher et plus confortable que les parcs nationaux.

Après avoir quitté ce lieu singulier nous croisons sur la route un lézard qui ne semble pas vouloir bouger de cet endroit visiblement confortable. Ce Blue Tongue Skink nous obligera à nous arrêter pour prendre des photos avant qu’il ne se décide à poursuivre son chemin.

Il ne reste plus qu’à finir la route jusqu’à Geraldton, agréable ville de bord de mer où nous profitons des douches gratuites sur les plages du centre ville avant de faire des crêpes sur les barbecues publics du front de mer. Encore un de ces moments où on se dit que la vie ici est vraiment difficile…