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Oz. Un an en australie (et plus si affinités)

J+140 — Cradle Mountain

Publié le

Le livre de randonnée indiquait une balade qui semblait très sympa à faire à Cradle Mountain, sauf qu’elle devait se faire en deux jours. On s’est dit que 15 kilomètres en 8 heures, ça doit pouvoir se faire en une journée, mais par contre il faudrait qu’on ne parte pas trop tard. Du coup on a cherché le jour précédent l’endroit le plus proche de Cradle Mountain pour dormir gratuitement et avons trouvé à quelques kilomètres de là quelques chemins déserts dans Vale of Belvoir, dont nous avons profité en remarquant l’absence de panneau interdisant de camper là. Et c’est donc à 7h30 du matin que nous nous levons en croisant un wallaby parcourant la plaine devant le van pour commencer cette journée qui s’annonce longue. Heureusement, nous avons vérifié la météo, elle n’annonce pas de pluie, mais seulement beaucoup de nuages. Bon au pire tant pis pour la vue, tant qu’on n’est pas mouillés ça va !

Arrivés au parc national, le visitor centre nous dit qu’on ne peut pas prendre la voiture jusqu’à Dove Lake, le départ de la balade, et qu’il faut prendre le "shuttle", la navette en bus, en laissant la voiture au visitor centre, à 10 km du départ. Sauf que le dernier bus pour rentrer est à… 18h20. Il est déjà 9h, ça va faire un peu court si on veut flâner sur le parcours, mais tant pis. En réalité une fois en haut nous verrons qu’il est tout à fait possible d’amener sa voiture jusque là, c’est simplement déconseillé pour ne pas surcharger la petite route. Si ce conseil s’applique bien aux touristes qui ne viennent que faire un tour de quelques minutes, pour nous qui prévoyons une longue randonnée ce jour-là, on aurait préféré être un peu plus souples sur les horaires, mais bon tant pis.

Sur le parking du Visitor Centre nous sommes apostrophés par deux van-voyageurs à l’accent français qui nous demandent si on n’a pas un blog… Et si ! Nous rencontrons donc des lecteurs de ce journal en la personne d'Eric et Lise qui sont tombés sur ce journal en cherchant le net car ils ont eu exactement le même problème que nous avions eu avec le nôtre. Coût des réparations : près de 2000$. Pour un van payé 8000$. Gloups. On se dit qu’on a eu de la chance nous avec notre van à 4250$ et 1200$ de réparations alors que c’était encore plus grave. On commence aussi à se dire que nous sommes peut-être des stars internationales sans le savoir, et que toute l’australie francophone nous lit ? Bon, peut-être pas. N’empêche, le monde est petit !

Le temps de papoter, de se plaindre de nos vans respectifs, de prendre le shuttle, il est déjà 10h quand nous arrivons à Dove Lake, et nous partons tous les quatre pour monter bien sec jusqu’à Marion’s Lookout à 1200 mètres d’altitude, soit déjà 300 mètres de gravi en une heure. Problème, à ce point de vue, la vue est… un peu enbrumée.

Il fait froid et humide, on ne voit rien à plus de 20 mètres mais on ne se décourage pas, même si Eric et Lise semblent commencer à regretter de nous avoir suivi dans les hauteur, déjà qu’ils nous trouvaient sportifs (ha ha ha ! dis-je en mangeant du nutella allongé dans le canapé du van). Mais en arrivant vers Kitchen Hut, le premier refuge sur notre chemin, le ciel s’éclaircit, les nuages montent s’éloignent et nous laissent apercevoir le sommet de Mt Cradle et un beau soleil qui ne nous quittera plus de la journée. Bonne nouvelle, sauf pour les deux pulls et le bonnet que j’avais mis en partant, qu’il va me falloir porter dans le sac jusqu’à la fin.

Et justement le sommet, parlons-en ! Car Kitchen Hut c’est aussi l’endroit où il nous faut décider si nous suivons Eric et Lise vers le sommet (qui n’est pas prévu dans notre déjà longue balade du jour) ou si nous continuons tout de suite sur l’itinéraire prévu. Bon aller, va pour le sommet, et on avisera ensuite, on discute bien et le chemin a l’air tout à fait dans nos habitudes : il faut quitter les confortables petits ponts en bois qui évitent de se mouiller les pieds dans la boue et escalader des rochers pour gagner 350 mètres de dénivelé et le sommet à 1545 mètres. Bref, un truc qui tue bien les jambes, mais qui est super rigolo à faire. Anne grimpe mieux que moi, qui doit m’arrêter à plusieurs reprises pour reprendre mon souffle, mais bon aussi pour admirer la vue sur Dove Lake quand même.

À quelques minutes du sommet alors que nous mangeons un bout, nous sommes rejoints par un couple d’allemands qui nous reconnaissent : ils étaient avec nous sur le ferry, trois semaines plus tôt. Évidemment, nous on ne se souvient pas du tout d’eux mais bon, ça doit être ça d’être célèbre aussi !

Une fois au sommet nous terminons de déjeuner avec Eric et Lise et admirons la vue tout autour, et surtout d’avoir grimpé aussi vite. Le sommet en lui-même est un amas de pic rocheux, avec quelques touffes d’herbes, un décor très alpin.

Puis nous redescendons et nous quittons Eric et Lise qui prennent Face Track pour terminer la boucle, et nous décidons que comme il n’est "que" 14h et qu’il ne nous reste "que" deux tiers de la randonnée à faire, nous pouvons continuer, au pire on se pressera un peu. Nous empruntons ensuite l’Overland Track sur un petit tronçon, en croisant de nombreux randonneurs venus là pour plusieurs jours, comme ce couple qui nous indiquera quelques directions et qui allait résider à Waterfall Valley, premier camp sur l’Overland Track, pour une semaine. Certains autres sont en route justement sur l’Overland, une randonnée de huit jours, qui va jusqu’à Lake St Clair. Cette randonnée est hélas dépassée par son succès et pour limiter les randonneurs il existe un système de réservation (payant : $200 par personne quand même, à ajouter au Pass pour les parcs nationaux de Tasmanie qui coûte déjà 60$ par voiture) pour la parcourir entre octobre et mai (les autres mois sont gratuits, mais beaucoup plus froids et neigeux !). En tout cas, ça donne pas mal envie aussi, surtout quand on découvre les paysages, avec d’un côté l’autre flanc de Cradle Mountain, et de l’autre Barn Bluff qui s’élève à l’horizon.

Barn Bluff

Enfin nous quittons l’Overland Track et prenons la direction de Lake Rodway et Scott Kilvert Memorial Hut, refuge érigé suite à la disparition d’un professeur et son élève dans les années soixante, morts de froid à cet endroit. Signe que la montagne, si elle est belle et ensoleillée en ce jour, peut aussi se révéler dangereuse, froide et glacée. Nous descendons à travers de la végétation basse, sur un sentier un peu raide et envahi par les ruisseaux, puis à travers une forêt humide qui a l’air d’être terriblement vieille. Une fois au refuge, Anne panique un peu en voyant le panneau indiquant le parking de Dove Lake à trois heures de marche, alors qu’il était déjà 16h et que le dernier bus passait à 18h20. Du coup je sue et souffle pour la suivre, elle qui court quasiment pour remonter la vallée jusqu’à Rangers Hut à travers les torrents, ruisseaux, flaques, ponts et végétation touffue.

Finalement on arrive à Rangers Hut en 40 minutes, et le panneau que l’on voit indique le parking à une heure de marche de là… On est largement bons ! On se repose un peu de cette course, on visite Rangers Hut qui ne sert désormais plus que pour les urgences comme Kitchen Hut, et on repart en prenant le temps de se poser pour prendre des photos et admirer ce paysage unique, qui ne donne pas vraiment envie de le quitter.

On redescend tranquillement (enfin nous, parce que le chemin lui est plutôt abrupt) jusqu’à Dove Lake, on s’arrête pour une dernière photo de Cradle Mountain, et il est déjà… 17h45. Nous arrivons donc avec 35 minutes d’avance sur le dernier bus, peut-être qu’au final on n’aurait même pas eu besoin de se presser ?

Cradle Mountain

Nous signons notre retour sur le cahier de suivi des randonneurs (où il faut indiquer son heure de départ et le parcours prévu avant de partir, et signer quand on revient, ça sert au parc national pour faire des statistiques ou pour vous retrouver si vous êtes reporté disparu), et nous attendons le bus en observant le soleil s’abaisser sur Cradle Mountain, en se disant qu’aujourd’hui on a fait dans les 20 kilomètres et près de 900 mètres d’ascension, et qu’on se sent même pas complètement crevés. Enfin juste un peu.

Il nous reste juste assez d’énergie pour aller voir un wombat brouter dans une clairière vers le parking du Visitor Centre, et repartir vers un camping pour une nuit de sommeil bien mérité. Même si pour moi c’est quasiment une certitude : il faut que je revienne ici, j’en ai pas assez profité car c’est vraiment une des plus belles montagnes que j’ai jamais vu.